vendredi 31 juillet 2009

Un juste avertissement


D'aussi loin que je me souvienne (c'est-à-dire l'école primaire, à peu près), j'ai toujours détesté les manifestations machos empreintes de la loi du plus fort, du meilleur, du plus grand. Autant dire que les héros de la guitare ou plutôt les hérauts de la guitare, ça convient bien mieux, m'ont toujours laissé froid. Qu'est-ce que ça peut faire de pouvoir faire deux cents notes à la seconde et d'avoir des doigts de trente centimètres de portée ? Et tout ça, c'est de ta faute, Jimi Hendrix. Ils n'ont vu en toi qu'un phénomène de foire, en oubliant que la musique était surtout portée par le coeur qu'on y mettait, et la nonchalance à faire sonner juste (et puis bien sûr ils ont oublié ta voix chaude que je trouve toujours touchante, les nuls). Alors bien sûr, un minimum de technique est requise, et plus la technique est bonne, plus les notes viendront facilement. Mais voilà, les gars en récré, ils grandissent sans mûrir, ce qui a pour conséquence qu'ils adorent les types qui font des trucs incroyables avec une guitare dans les mains. Pfff.
Du coup, lorsque Eddie Van Halen a débarqué, on eut droit à une horde de hardos qui eurent leur dieu à vénerer, celui qui avait pondu Eruption. Eddie, c'est le plus fort, et pis en plus, il fait un truc de fou, il tape sur sa guitare avec ses doigts, ça fait un son, t'y crois pas, incroyable le nombre de notes, la vitesse de dingue qu'il a ! Trop bien, je vous le dis, les gars, ça c'est du rock.

Et mon cul c'est du poulet.

Trente ans ont passé, il est donc temps de réhabiliter Van Halen, le groupe. Pour plusieurs raisons : David Lee Roth (qui est l'instigateur de ce nom), leurs compositions, leur humour, leur bonne humeur et la durée de leurs disques. Inutile de dire qu'après la période David Lee Roth, il ne faut rien garder. Et je suis indulgent, vu que leur sixième et dernier album ensemble, 1984, est catastrophique.

Les albums de VH (j'ai la flemme, ok ?) durent en moyenne trente-cinq minutes, ce qui permet, premier avantage, d'en écouter d'autres, et, deuxième avantage, de ne pas trop lasser. Surtout qu'en général, on y trouve des reprises de tubes des années 60 (le Pretty Woman de Roy Orbison, le You Really Got Me des Kinks, par exemple), des interludes guitaristiques rarement ennuyeuses ou creuses, plutôt motivées par l'expérimentation et la recherche (comme Spanish Fly sur leur second album bien nommé II ou encore Cathedral sur Diver Down), des chansons où le groupe tourne au jazz de la Nouvelle Orléans ou décide de faire du Platters, et enfin des choeurs tout le temps. Mais tout le temps, sur tous leurs titres. Et on appelle ça du hard-rock - laissez-moi rire.

Alors pourquoi choisir ce Fair Warning pour parler de ce groupe mésestimé (surestimé d'un côté tout ça parce que les gars des récrés, hein, et haï de l'autre car justement, les gars des récrés, en face, ils comprennent rien à Joy Division, les nuls) ? Parce que, petit un, c'est leur meilleure pochette. Petit deux, ils perdent sur celui-ci la légèreté qu'ils affectionnaient jusqu'à lors, deviennent un peu sérieux : pas de reprise, pas d'interlude ici. Et petit trois, il s'agit de leur album funky : la basse n'a jamais été aussi présente, la batterie si relativement modeste et la voix de David Lee Roth plus sensuelle.

Non, vraiment, un panthéon et des prix d'excellence pour ce groupe ne sont pas nécessaires. Mais comme récré, on a rarement fait mieux.

Et pis tiens, petit cadeau, ça me fait plaisir.